Le sadomasochisme peut être défini comme le fait de donner ou de recevoir du plaisir, souvent sexuel, en infligeant ou en subissant de la douleur ou de l’humiliation. Il peut s’agir d’une amélioration du plaisir sexuel ou, dans certains cas, d’un substitut ou d’une condition sine qua non. L’infliction de la douleur est utilisée pour inciter au plaisir sexuel, tandis que la simulation de la violence peut servir à former et à exprimer l’attachement. En effet, les activités sadomasochistes sont souvent initiées à la demande et au bénéfice du masochiste, qui dirige souvent ses pratiques à travers des indices émotionnels subtils.
Le sadomasochisme consensuel ne doit pas être confondu avec des actes d’agression sexuelle. De plus, alors que les sadomasochistes recherchent la douleur et l’humiliation dans le contexte de l’amour et du sexe, ils ne le font pas dans d’autres situations et détestent la violence ou les abus simples et crus. En bref, et en général, les sadomasochistes ne sont pas des psychopathes. Bien que la psychopathie, ou trouble de la personnalité antisociale, soit un trouble mental pouvant être diagnostiqué, le sadomasochisme ne peut être diagnostiqué que s’il cause une détresse ou une déficience importante pour l’individu ou nuit aux autres.
Certaines études ont suggéré que les fantasmes sadiques sont aussi fréquents chez les femmes que chez les hommes. Cependant, il semble que les hommes avec des envies sadiques tendent à les développer plus tôt. Alors que certaines personnes sadomasochistes sont purement sadiques et d’autres purement masochistes, beaucoup d’entre elles sont à des degrés divers et peuvent se décrire comme «versatiles».
Les origines
Le sadomasochisme est un porte-drapeau du sadisme et du masochisme, des termes inventés par le psychiatre allemand du 19ème siècle Richard Von Krafft-Ebing, qui a parlé des tendances naturelles fondamentales au sadisme chez les hommes et du masochisme chez les femmes.
L’homme est celui qui désire, la femme qui est désirée. C’est tout l’avantage décisif de la femme. A travers les passions de l’homme, la nature a mis l’homme aux mains de la femme, et la femme qui ne sait pas comment en faire son sujet, son esclave, son jouet ou comment le trahir avec le sourire n’est pas sage. Elle en profite parfois, et ça fait d’elle une maitresse assoiffée de pouvoir.
Les premières théories
Le médecin allemand Johann Heinrich Meibom a introduit la première théorie du masochisme dans son Traité sur l’usage de la flagellation dans la médecine et la vénération (1639). Selon Meibom, la flagellation d’un homme réchauffe le sperme dans ses reins, ce qui conduit à une excitation sexuelle qui transperce ses testicules. D’autres théories du masochisme parlaient du réchauffement du sang ou de l’utilisation de l’excitation sexuelle pour atténuer la douleur physique.
Dans Psychopathia Sexualis (1886), un recueil d’histoires sexuelles et de crimes sexuels, Krafft-Ebing n’a pas fusionné le sadisme et le masochisme, les présentant comme étant issus de différentes logiques sexuelles et érotiques. Freud, quand à lui, note que le sadisme et le masochisme se retrouvent souvent chez les mêmes individus et, en conséquence, il a combiné ces termes pour en faire un. Il assimile le sadisme à une distorsion de la composante agressive de l’instinct sexuel masculin et le masochisme comme une forme de sadisme contre soi et une aberration plus grave que le simple sadisme.
Freud met en évidence le fait que la tendance à infliger et à recevoir de la douleur pendant les rapports sexuels est «la plus commune et la plus importante de toutes les perversions» et l’attribue, comme tant d’autres, à un développement psychologique incomplet ou aberrant dans la petite enfance. Il accordait peu d’attention au sadomasochisme chez les femmes, soit parce que le sadisme était supposé se produire principalement chez les hommes, soit parce que le masochisme était considéré comme la tendance normale et naturelle des femmes.
Qu’est-ce qui peut donc expliquer ce penchant pour le sadomasochisme ?
Une peur de la trahison et des déceptions amoureuses ?
Beaucoup d’expert de la psychologie l’admettent, le sadomasochisme est difficile à comprendre. En effet, beaucoup de nos émotions et de nos actes les plus intenses résultent de plus d’une impulsion. De toute évidence, le sadique peut tirer profit des sentiments de pouvoir, d’autorité et de contrôle, et de la «souffrance» du masochiste. Le sadique peut aussi avoir un désir inconscient de punir l’objet d’attirance sexuelle, cette personne ou cette partie du corps qui a ‘’osé’’ suscité son attention et ainsi subjugué ou, dans certains cas, avoir frustré son désir ou suscité sa jalousie.
En instrumentalisant son partenaire, qui est ainsi rendu un sous-Homme, un trophée, un simple jouet, et si l’on peut posséder un jouet et peut-être le frapper, on ne peut pas en tomber amoureux, ni en être blessé ou trahi.
Un transfert de mauvaises pensées, d’un mal-être ?
Le sadisme peut également représenter une sorte d’activité de projection ou de bouc émissaire dans laquelle des sentiments inconfortables tels que la colère et la culpabilité sont transférés vers une autre personne. Le bouc émissaire est une impulsion et une pratique anciennes et profondément enracinées. Selon Lévitique, Dieu a demandé à Moïse et à Aaron de sacrifier deux chèvres chaque année. La première chèvre devait être tuée et son sang répandu sur l’Arche d’Alliance. Le Souverain Sacrificateur devait alors poser les mains sur la tête de la seconde chèvre et confesser les péchés du peuple. À la différence de la première chèvre, cette deuxième chèvre chanceuse ne devait pas être tuée, mais être relâchée dans le désert avec son fardeau de péché, raison pour laquelle elle était connue sous le nom de bouc émissaire. L’autel qui se trouve dans le sanctuaire de chaque église est un vestige symbolique et un rappel de cette pratique sacrificielle, l’objet ultime du sacrifice étant bien sûr Jésus lui-même.
Pour le masochiste, assumer un rôle d’assujettissement et d’impuissance peut permettre de se libérer du stress ou du fardeau de la responsabilité ou de la culpabilité. Cela peut aussi évoquer des sentiments infantiles de dépendance, de sécurité et de protection, qui peuvent servir de substitut à l’intimité. En outre, le masochiste peut prendre plaisir à obtenir l’approbation du sadique, commandant toute son attention et, d’une certaine manière, le contrôlant.
Un moyen de pimenter les relations sexuelles banales ?
Le sadomasochisme peut être considéré comme un moyen d’intensifier les relations sexuelles ‘’banales’’ (la douleur libère des endorphines et d’autres hormones de plaisir). Cette pratique permet aux partenaires de régresser vers un état plus primal ou animal, tester leurs limites, fait naitre ou ravive certaines pulsions sexuelles et certains désirs ou simplement jouer et s’amuser avec le corps de l’autre. Dans son récent livre, Aesthetic Sexuality, Romana Byrne va jusqu’à affirmer que les pratiques SM peuvent être motivées par certains objectifs esthétiques liés au style, au plaisir et à l’identité, et peuvent donc être comparés à la création artistique.
Le SM comme moyen de rééquilibrer un couple ?
Dans presque toutes les relations, un partenaire est plus attaché que l’autre, ce qui amène le partenaire le moins attaché à devenir dominant, tandis que le partenaire plus attaché devient soumis dans le but de pacifier, plaire et de séduire l’autre. Finalement, le partenaire le moins attaché se sent étouffé et prend de la distance, mais s’il s’aventure trop loin, le partenaire le plus attaché risque tout simplement de s’en aller. Cela pousse le partenaire le moins attaché à devenir le plus enthousiaste des partenaires. Finalement, la balance se rétablit, jusqu’à ce qu’elle soit à nouveau bouleversée, et ainsi de suite à l’infini. La domination et la soumission sont des éléments de la plupart des relations, mais cela ne les empêche pas d’être fastidieux, stériles et, pour reprendre Freud, immatures.
Plutôt que de jouer au chat et à la souris, les amoureux doivent avoir la confiance et le courage nécessaires pour se démarquer, et pas seulement en se mariant. En apprenant à se faire confiance, ils peuvent oser se voir comme les êtres humains à part entière qu’ils sont vraiment, plutôt que comme de simples objets de satisfaction personnelle.
Le véritable amour consiste à respecter, à partager, à nourrir et à favoriser, mais combien de personnes ont la capacité et la maturité pour ce genre d’amour ?
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